La technologie des sous-marins nucléaires pourrait être l’un des enjeux de l’élection présidentielle sud-coréenne
En septembre, nombreux furent les observateurs à estimer que l’accord sur les sous-marins nucléaires conclu par l’Australie avec les États-Unis et le Royaume-Uni dans le cadre de l’alliance AUKUS allait ouvrir la boîte de Pandore. Notamment parce que la décision – inédite – de Washington de partager une telle technologie allait encourager d’autres pays à s’en doter à leur tour, comme la Corée du Sud par exemple.
Cela fait près d’une vingtaine d’années que Séoul envisage de doter sa marine de sous-marins nucléaire d’attaque [SNA]. En 2019, un groupe de travail fut mis en place afin d’étudier les modalités pour en acquérir aux moins deux exemplaires, dans une perspctive, cependant, de long terme.
« Un sous-marin à propulsion nucléaire est considéré comme le moyen le plus efficace pour détecter et détruire les sous-marins nord-coréens armés de missiles mer-sol balistiques stratégiques car il est capable de mener des opérations sous l’eau pendant une période plus longue », avait alors expliqué l’amiral Sim Seung-seob, le chef des opérations navales de la marine sud-coréenne. « Nous reconnaissons l’utilité et la nécessité d’un sous-marin à propulsion nucléaire, car il s’agit d’une force de dissuasion utile pour réagir simultanément à la Corée du Nord et aux pays voisins », avait-il ajouté.
En 2004, après des fuites dans la presse, Séoul avait mis un terme à l’initiative 362, un projet clandestin visant à développer un sous-marin à propulsion nucléaire. Mais, comme en témoigne le groupe de travail formé en 2019, cet objectif n’a jamais été perdu de vue par la marine sud-coréenne. Et, un an plus tard, selon Le Figaro [édition du 6 octobre 2021], la Corée du Sud aurait fait une demande de transfert de technologie auprès des États-Unis.
» Ils savaient très bien que les Américains diraient non, mais ils ont pris date, en indiquant qu’en cas de refus, ils iraient voir ailleurs « , a confié un « stratège » sud-coréen au quotidien. Vraiment?
Quoi qu’il en soit, et après que l’alliance AUKUS a été officialisée, un appui français à un programme sud-coréen de sous-marins nucléaires a souvent été évoqué. Et pour cause : la France paraissait alors le partenaire le plus naturel pour la Corée du Sud dans ce domaine. Et cela pour plusieurs raisons… à commencer par les accord qui lient Séoul à Washington.
En effet, le traité bilatéral de défense entre la Corée du Sud et les États-Unis interdit tout transfert de technologies nucléaires des seconds vers la première… Et toute livraison d’uranium enrichi à Séoul doit obtenir d’abord le consentement de Washington. Or, les réacteurs nucléaires des sous-marins américains [et britanniques] fonctionnent avec de l’uranium hautement enrichi… Ce qui n’est pas le cas de ceux produits en France.
Cela étant, il n’est pas acquis que Séoul adopte la technologie française… Candidat du Parti démocrate, actuellement au pouvoir, à l’élection présidentielle du 9 mars 2022 [et pour laquelle le président sortant, Moon Jae-in, ne se représente pas], Lee Jae-myung a visiblement l’intention de faire de la question des sous-marins nucléaires un enjeu de la campagne électorale en cours.
Ainsi, dans un entretien donné à l’agence Reuters, M. Lee a défendu l’idée de doter la marine sud-coréenne de tels navires, tout en écartant la possibilité de solliciter l’appui de la France… Et pour cause : il a expliqué que, s’il est élu, il tenterait de persuader les États-Unis de fournir à son pays une « aide diplomatique et technologique », à l’instar de celle obtenue par l’Australie.
« Il est absolument nécessaire que nous ayons ces sous-marins
. […] Un transfert de technologie est en cours vers l’Australie » et « nous pouvons certainement convaincre les États-Unis » d’en bénéficier aussi. « Nous devons le faire », a soutenu le candidat du Parti démocrate sud-coréen.
En attendant, le chantier naval de Daewoo Shipbuilding and Marine Engineering Co. [DSME] a lancé, ce 30 décembre, la construction du second sous-marin à propulsion classique de classe Chang Bogo III, Batch II [programme KSS-III]. Par rapport au premier de la série, le Dosan Ahn Changho, ce navire sera plus imposant avec ses 3600 tonnes de déplacement et ses dix systèmes de lancement vertical [VLS] pour les missiles Cheon Ryong [d’une portée de 1500 km] et Hyunmoo.
source : Opex 360